Quand La
Poubelle se réveilla, quand s’effaça le souvenir de son rêve il grelottait de froid. Feu ou glace, il n’y avait pas de milieu dans le désert.
Il se leva en gémissant, rentra les épaules pour se protéger de la morsure du froid. Au-dessus de lui, des milliers d’étoiles scintillaient, si proches qu’il aurait pu les toucher, baignant le désert de leur froide clarté.
Il revint à la route, grimaçant tant sa peau et ses os lui faisaient mal. Mais qu’importaient ses souffrances désormais ? Il s’arrêta un moment, regarda la ville qui rêvait dans la nuit tout en bas (de petites étincelles de lumière jaillissaient çà et là comme des feux de camp électriques). Puis il se remit en route.
Quand l’aube
commença à colorer le ciel, des heures plus tard, Cibola paraissait presque aussi lointaine que lorsqu’il l’avait vue pour la première fois en haut de la côte. Et, comme un pauvre fou qu’il était, il avait bu toute sa réserve d’eau, oubliant que tout paraissait plus proche dans le désert. Il ne pourrait marcher longtemps après le lever du jour. Il lui faudrait se coucher encore, avant que le soleil commence à frapper avec toute sa force.
Une heure après l’aube, il trouva une Mercedes qui était sortie de la route le côté droit enfoncé dans le sable jusqu’à la hauteur des portières. Il ouvrit la porte avant gauche et tira dehors deux cadavres fripés, simiesques – une vieille femme couverte de bijoux, un vieil homme aux cheveux d’un blanc immaculé. En marmonnant des mots sans suite, La Poubelle prit les clés de contact, fit le tour de la voiture et ouvrit le coffre. Les valises n’étaient pas fermées à clé. Il sortit des vêtements, les étala sur le bord du toit de la Mercedes pour qu’ils retombent sur les fenêtres, puis les cala avec des pierres. Il avait maintenant sa grotte, obscure et fraîche.
Il se glissa à l’intérieur de la voiture et s’endormit. Vers l’ouest, des kilomètres et des kilomètres plus loin, Las Vegas resplendissait sous le soleil d’été.